C’est comme une histoire inventée
mercredi 20 novembre 2013, par

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C’est comme une histoire inventée, ce que répète sans cesse la voix de la petite couverture blanche, la couverture et le fait qu’elle allait mourir cent fois elle le raconte, ou c’est pour convaincre le monde, le bébé à l’étage malade c’est elle.
Et elle au rez-de-chaussée emmenée réchauffée, recouverte d’onguents et de patience. Parce que la femme qui la prend dans ses bras, des enfants elle n’en a aucun, que celui-là, qui risque de partir, il n’est plus à personne, une toute petite fille à qui ils ont dit au revoir, et la couverture blanche qui la guette c’est la mort, le linceul, c’est l’oblique, l’inclinaison du trait frôle sa tête. Une enfant qui n’est plus à personne, elle la prend.
L’oblique se cogne contre le rez-de-chaussée, l’oblique voulait transpercer à l’étage et l’enfant n’est plus là.
C’est comme dans les contes et légendes quand la fille du meunier doit filer de la paille pour la changer en or, et qu’on vient lui chercher son premier bébé en échange.
Celle qui était restée là-bas, venue ici, la donne, il y a les limbes, il y a la fatalité.
Elle attend des nouvelles, deux jours après elle est sauvée, cent fois elle me l’a dit je n’ai rien entendu, pourtant j’ai écouté, pas entendu qu’avec elle moi aussi j’étais sauvée,
et pas compris le jour où j’ai acheté une petite couverture, pour faire joli, sans y penser, une blanche, parce que c’est beau le blanc, non pas compris les limbes et la nuit inversée qu’elle y a vus et le grand tremblement, le grand tremblement - sa main a pris ma main elle a dit non - je n’ai pas écouté, elle répète souvent, maintenant je l’entends.
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Messages
1. C’est comme une histoire inventée, 20 novembre 2013, 09:33, par brigitte Celerier
et comme tes mots nous font croire qu’on est en elle, celle qui est venue, vais l’emmener avec moi dans le jour (j’attendais) et tenter de lui donner douceur
2. C’est comme une histoire inventée, 20 novembre 2013, 17:20, par Pierre R Chantelois
La blancheur des émotions dans la grisaille du temps. La tristesse avant la mort.
3. une histoire inventée, 22 novembre 2013, 19:42, par PdB
il y a des moments où il fait très froid, et même si on est un peu malade, ou qu’on a envie de pleurer, il y a le temps qui s’en va, la petite couverture blanche, et la petite voix, là, pas si loin (j’aime quand les rails tournent ensemble, la convergence des parallèles je crois)