journalier 28 04 15 / Ouse
mardi 28 avril 2015, par
– Une grande partie de la journée entièrement tournée vers le faire, gestes qui éradiquent. Le cerveau au repos, lie se dépose, ensuite, une fois les éponges reposées, ne reste peut-être que l’important.
– À deux jours d’ici, le 29 avril, mais d’il y a 85 ans, VW écrit :
"Et je viens à l’instant de terminer, de cette même plume encore pleine d’encre, la dernière phrase des Vagues. Je crois qu’il fallait que je consigne cela pour ma propre information. Oui, cela représente le plus grand effort intellectuel que j’aie jamais connu ; du moins les dernières pages. Il ne me semble pas qu’elles pendouillent autant que d’habitude ; et je crois m’en être tenue à mon plan initial avec une fermeté pleine d’abnégation. Là s’arrêtent les compliments que je puis me faire. Car je n’ai jamais écrit un livre aussi plein de trous ni aussi rapiécé ; il va demander une certaine reconstruction, et non pas seulement du remodelage. J’ai bien peur que la structure ne soit pas fameuse. Mais tant pis ! J’aurais pu me contenter de quelque chose de facile, coulant de source ; tandis que là, j’ai voulu tenter d’appréhender la vision que j’ai eue durant ce malheureux été (ou ces trois semaines), à Rodmell, après La Promenade au phare." (traduction de Colette-Marie Huet et Marie-Ange Dutartre)
– Je cherche Rodmell, y trouve Monk’s house, les champs, la dernière fois, 28 mars 1941. Je n’imaginais pas avant aujourd’hui que tout devait être en fleurs, ou presque, la végétation dans sa phase de réveil. Et où étaient les chiens. Quelle heure était-il, faisait-il froid. Vue du ciel, la distance semble grande.
– Le 2 février 1931, VW rend compte dans son Journal d’une sorte d’état des lieux de l’écriture des Vagues. Elle va ensuite donner à lire le manuscrit final à Leonard. Récapitulant les étapes de travail avec une liste de dates, elle se trompe ce jour-là en indiquant que la fin de la première mouture s’est faite le 10 avril 1930, et non pas le 29. Le 10 est un jour qui n’existe pas dans son Journal.
Le lendemain, donc le 11 avril 1930, aucune évocation non plus des Vagues : "Hier nous avons visité les serres de Waddesdon avec Mr Johnson. (...) Des cyclamens par milliers. Des azalées massées comme autant de fanfares. (...) Les statues sont enveloppées dans des draps, comme des chevaux morts. Tout l’endroit est mort. Créé, planté, mis en place en 1880. Une seule fleur aurait donné plus de plaisir que ces dizaines de milliers. Et cette chaleur ! cet ordre ! cette perfection ! cette organisation ! (...)"
– J’aime que les dates ne correspondent pas, son aversion pour la perfection organisée ou l’organisation parfaite (que j’ai en aversion aussi) (les dates aussi se rebiffent contre moi, souvent).
– Des statues enveloppées dans des draps, comme des chevaux morts. Sous quelle date oubliée se trouve ce que j’ai mis sous draps, et la forme de mes morts, chevaux ou autres, c’était quoi.
(Rodmell)
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(site sous licence Creative Commons BY-NC-SA)
Messages
1. journalier 28 04 15 / Ouse, 28 avril 2015, 19:03, par brigetoun
ne le sais,
mais partage aussi cette aversion (un peu trop, je pique des fards quand j’imagine le regard d’autrui sur mon antre, quand m’y love, ce qui est trop fréquent) pour l’ordre et puis il y a ma crainte devant la perfection, crainte qui se mue parfois, grâce à Dieu ou la chance, en vénération, mais pas toujours
1. journalier 28 04 15 / Ouse, 29 avril 2015, 09:35, par Christine Jeanney
Crainte ou vénération, c’est comme si on ne pouvait pas rester tiède devant le parfait (et c’est parfaitement compréhensible en même temps :-)))
2. journalier 28 04 15 / Ouse, 28 avril 2015, 19:22, par Hervé
Après consultation d’une éminente géographe et néanmoins récemment versée dans cet art délicat - depuis sa triple traversée incompréhensible d’ailleurs de la Sarthe- l’Ouse est le nom de la rivière où VW se laissa glisser, les poches pleines de cailloux, pour ne plus jamais en ressortir vivante.
1. journalier 28 04 15 / Ouse, 29 avril 2015, 09:38, par Christine Jeanney
(la triple traversée de la Sarthe est une expérience fondatrice et ô combien remuante) (autant qu’incompréhensible) (inopinée) (surprenante aussi) (pas étonnant qu’il y ait séquelles géographicoperturbantes)
Et l’Ouse est vraiment large (je n’en avais pas idée on plus)
3. journalier 28 04 15 / Ouse, 29 avril 2015, 09:15, par Dominique Hasselmann
la rivière comme dernière "house".
1. journalier 28 04 15 / Ouse, 29 avril 2015, 09:38, par Christine Jeanney
oui, pas anodin ce nom, ça m’a frappée aussi...