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« la vie ça éparpille des fois / ça chélidoine et copeaux / ça bleuit ça noisette » [Maryse Hache / porte mangée 32]

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journalier 05 12 15 / "nous"

samedi 5 décembre 2015, par C Jeanney


 j’ouvre à nouveau Audacity, une fois de plus pour Oblique, mais différemment, sans lire le texte lui-même, plutôt dans l’optique de rester en retrait comme on ouvre un rideau sur une scène, en s’écartant
 je découvre des voix fortes (et drôles), des images aussi merveilleuses que terrifiantes, c’est comme un grand bol d’air (qui vient des USA), une rafale, un déferlement, les volets claquent et disent que rien n’est vraiment impossible au fond
 et je me force à avancer dans une autre forme de lecture (une biographie de V W) malgré un problème de forme : je dois passer par-dessus le style, impératif, phrases qui claquent, beaucoup de points d’exclamation qui prennent par le col ou pointent leur index contre mon torse sans exprimer l’ombre d’un doute, et même en indiquant que s’il y a des parts d’ombre, elles existent sans aucun doute, du doute on ne doute pas (une manière assez leste d’échapper à l’accusation d’asséner tout en assénant)
 me heurtent dans ce texte les "Mais nous n’en sommes pas encore là !", surtout ce "nous" à impact double : il me relègue au rang d’élève studieuse à nourrir avec parcimonie et entendement (car si "nous en étions déjà là", aurions-nous, pauvres petites choses/lecteurs, les capacités intellectuelles de suivre ?), et (double détente et double peine) ce "nous" indique que l’auteur n’est pas un simple "je" (c’est-à-dire pas un humain standard qui va au wc, comme moi et comme tout le monde) mais un je augmenté, donc un "nous" respectable, augustement posé sur l’ultime barreau d’une échelle dont je n’entrevois pas les pieds, trop hauts pour moi
 et est-ce que ce problème de forme n’entache pas le fond, car qu’est-ce que j’apprends réellement, ou plutôt qu’est-ce qui me restera, d’une voix aussi rugueuse à écouter (pour moi) (car d’autres trouvent ça très bien) (et même très très bien), à part un sentiment mitigé, encore plus incertain sur la teneur des choses, leurs fondements, leurs significations (j’ai besoin des "peut-être", de ce signe que quelque chose est vivant, et pas mort épinglé)
 ou ce texte agite devant moi ce que je n’aime pas voir, cette ligne de démarcation entre les êtres, séparant ceux à l’orgueil visible, les prédicateurs (j’avais écrit préducateurs, très bonne remarque, monsieur Ledoigtquisetrompedetouche), de ceux dont l’orgueil est à "usage interne" comme dit Antoine Emaz
 la ville est lumineuse, besogneuse, baguenaudeuse, comme pour contredire une tension souterraine et persistante, la vie va

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(site sous licence Creative Commons BY-NC-SA)

Messages

  • prédicateurs se veulent préducateurs. (je mets un point pour bloquer parce qu’ici ils redeviennent prédicateurs dès que j’ai la main tournée)
    Oui, la réaction normale (comment font les profs ? … les bons savent franchir nos défenses) est le recul, la réserve-en-attendant-de-voir devant ce qui se présente comme seule option, solution, regard… et les voix tranchantes
    Contente de ne pas me sentir canard sauvage ou de ne pas être seule.
    Et en attente admirative de ce qui sortira de cela

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