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« la vie ça éparpille des fois / ça chélidoine et copeaux / ça bleuit ça noisette » [Maryse Hache / porte mangée 32]

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La Crise de Joachim Séné

dimanche 21 avril 2013, par c jeanney

On écoute la radio le matin, pour se tenir au courant des nouvelles du monde, et il y a ces mots qui reviennent, provoquent toujours les mêmes craintes, les mêmes énervements, les mêmes abattements. Ce sont de pauvres mots toujours utilisés à l’identique, à en devenir des clichés, notre imaginaire commun, refrains qui valsent, que les discours ambiants reprennent et ne mettent jamais en doute, car ce serait se mettre en doute eux-même. La machine fabrique seule sa propre matière énergétique.
"La crise" est un mot froid et violent. Un mot qui justifie sa propre violence, se justifie, obstinément, s’autorise à devenir un fond sonore jamais contredit. Un mot sonneur de glas de toutes les explications possibles. Un mot volé aux autres mots, aplati, indifférent, utile.
Joachim Séné prend ce mot, le reprend, le déplace, le désinfecte de sa dose d’indifférence, de son pouvoir de rouleau compresseur lancé sur nous comme une évidence. Joachim Séné est le grain de sable dans les rouages : avec lui, "la crise" apparaît "toute nue", démasquée et retournée. C’est un mot qui résiste, reprend des forces, lutte, se moque, questionne. Ce mot, extirpé de la masse des mots laminoirs, récupère son sens individuel, poétique, ironique, décalé, actif.
On lit La Crise , et ensuite, on allume la radio le matin, on écoute les nouvelles du monde. Sauf que, maintenant, "la crise" avance à découvert.

*** (extrait)***


« Chaque année, "la crise" fait de tes résolutions ses vœux, et attend les intérêts de ta dette.


Nous sommes la farce de la dinde de "la crise".


La faim de "la crise" te justifie.


« La crise" te ronge, "la crise" te rogne, "la crise" est l’ogre sans haine


« La crise" possède cette série de masques qu’elle enfile sur son visage avant de manger ta face.


La une du JT écrit par "la crise" / La une de "la crise" écrit par le JT.


"La crise" ajoute épithètes et euphémismes à son nom. Sauvage. Néo. Ultra. À visage humain. Aveugle. Régulé... Les souffrances sont sans style, les figures déchirées.


La neige de "la crise" t’expulse en plein hiver.


"La crise" durable. »

( La Crise de Joachim Séné sur Publie.net )

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