TENTATIVES

« la vie ça éparpille des fois / ça chélidoine et copeaux / ça bleuit ça noisette » [Maryse Hache / porte mangée 32]

BLOCK NOTE

bloc note - restes

jeudi 24 juillet 2025, par c jeanney

Ce matin, 1/ l’idée d’une collection de photos de vestiges de fenêtres quand il ne reste qu’une poutre ou l’encadrement et que l’intérieur est rempli, de briques, de pierres, de ciment, 2/ l’ingestion d’un financier à la pistache (je propose que wall street et toutes les bourses soient faites de financiaristes à la pistache, et on les mangerait), 3/ retour aux Vagues que j’imprime au fur et à mesure que je les relis-vérifié-réarrange. Les livrets, pliés et ordonnés, s’empilent, en vue d’être percés pour se retrouver à la fin cousus ensemble, ce qui fera mon prototype, et ça commence à faire de l’épaisseur. Je me rends compte que je ne m’en rendais pas compte. Traduire Les Vagues a été beaucoup de travail, sur une longue durée, j’en avais la sensation, plus ou moins linéaire, comme on imagine le déroulement d’une rivière à partir d’un point sur la berge. Je veux dire que ce travail (de traduire Les Vagues) était assez "imaginaire", on pourrait dire "virtuel", mais ce n’est pas le bon mot, le virtuel n’existe pas vraiment, alors que l’imaginaire si, et même, il se voit partout, l’imaginaire qu’on a d’autrui, de la mort des abeilles, de notre extinction. Bref, mon travail existait dans les limbes. Là, il se palpe, il se soupèse. Je me rends compte aussi que je ne lis plus le texte comme avant, quand j’avançais paragraphe par paragraphe, et que j’avais besoin d’une image, d’un geste visuel, qui donnerait à ce paragraphe l’apparence d’un globe, d’une goutte, d’un corps dense. Les paragraphes ont disparu dans ma nouvelle lecture. J’ai vraiment l’impression de flottements, de resserrements par endroits, marqués par de petites choses dures, acérées, qui flottent, puis c’est plus calme. C’est très mouvant, bien plus mouvant que quand j’avais le nez dessus, au plus près. En fait, on n’a jamais fini (de comprendre, de ressentir, d’explorer, y compris un objet unique et répété). Examiner la même chose, même si ça reste la même chose, peut ouvrir régulièrement sur du plus élargi. Tout coule, tout évolue, comme dit l’autre. Par contre, il y a du pourrissement, ça aussi ça se répète. Dans la salle d’attente, j’avais emmené avec moi ce livre où il y a deux pages sur L’Art utile, et sur un autre courant d’art, réformateur, humaniste, d’Inde, les radicaux du Kerala, qui a pris fin quand le fondateur, Krishnakumar, s’est suicidé. Pour ce qui est de L’Art utile, il est inspiré par John Ruskin, qui pense que les structures qui traitent avec brutalité les hommes et l’environnement appauvrissent la vie. J’apprends que "Proust découvrit l’œuvre de Ruskin en 1899 et consacra sept années de sa vie à l’étudier. Il voyagea sur les traces de l’écrivain anglais, à Venise, Padoue, Rouen, Amiens et Abbeville. Il écrivit plusieurs articles pour faire connaître aux lecteurs français ce penseur qui le fascinait." Je ne retrouve pas où François Bon a raconté la rencontre ratée entre Proust et Joyce, mais grâce à cette histoire de Ruskin, je comprends mieux (ça ne pouvait pas coller entre eux je crois). De lien en lien je tombe sur le site de Grizzedale Arts, sur The Land We Live In, The Land We Left Behind, et sur cette photo d’Olaf Breuning (on n’imagine pas comme nous sommes nombreux, nombreuses, non ? et depuis tant de temps).

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(site sous licence Creative Commons BY-NC-SA)

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