block note - bras
mercredi 22 janvier 2025, par
J’ai programmé ma minute papillon n°45 la veille de sa mise en ligne, donc sur le fil, et ça m’a bien préoccupée, le petit chef suintait sa malveillance sur mon épaule (imprévoyante, dilettante, incorrigible jugeait-il), et pourtant je me demande si je n’ai pas bien fait d’être en prise avec le présent et de ne pas préparer mes minutes à l’avance comme on remplit un congélateur de tupperware, parce que sous ma minute il y a le bras levé de musk. Et aujourd’hui, jusqu’à samedi, je dois revoir le BAT de Bien assise qui me pose aussi un problème actuel, celui de la ponctuation et surtout des guillemets, est-ce que j’en mets pour indiquer que ce n’est pas moi qui parle, il y a la question de la confiance faite à l’autre, la question de la voix interne quand on lit, qui force à chercher en soi sa propre intonation. Si j’enlève les marques du semblant de dialogue de Bien assise, surtout dans la première partie qui est le compte-rendu d’un magma collant où les mots glissent, si je refuse les guillemets, je fais le choix pour l’instant des majuscules. ’Elle me dit Je vais bien’. Et je ne sais pas quoi faire. Si je choisis ’Elle me dit Je vais bien’, je présente, j’expose, en me plaçant devant ou à côté ou tout du moins au l’extérieur. Si j’écris ’Elle me dit je vais bien’, je rentre dans la tête de Elle, elle m’aspire. Ça, c’est l’effet sur moi. Mais pour autrui, est-ce que cela provoque le même écart, la même distance ou non distance. J’ai beaucoup moins de questionnements sur les phrases en tant que telles, elles sont là parce qu’elles devaient l’être. Maintenant, c’est le détail technique visible, ponctuation, majuscules, car je risque de me retrouver avec des phrases difficiles à comprendre si on ne capte pas qui en est l’émetteur. Et d’un autre côté, je risque de considérer autrui, qui lit, qui n’est pas moi, comme un enfant à qui montrer du doigt, tenir la main, placer le réhausseur pour qu’il soit à la bonne hauteur devant le lavabo (c’est déprimant comme attitude, je la supporte très mal quand on l’a envers moi). J’essaye de revenir à la source. Au tout début, j’avais écrit la première partie de Bien assise sans ponctuation du tout, ni virgules ni points ni rien et aucune marque de dialogue, un seul ruban. Ça me semblait "aller de soi", faire sens. Bien assise est en trois parties parce qu’il y a une progression : 1 le langage magma, 2 on se calme un peu, ça s’organise, quelques points et virgules etc., et 3, c’est organisé et ponctué, charpenté par des histoires, comme des planches de botanique, que l’on peut lire au calme, assis. Mais il y a la question du geste, du geste vers l’autre. Est-ce que montrer un langage magma, fait d’un ruban magmatique (partie 1), n’envoie pas un message du genre "débrouille-toi avec ça", ou le macronique "qu’ils viennent me chercher". Ne pas prendre l’autre pour une andouille. Mais ne pas l’ignorer non plus. Ne pas se poser là, comme un bout de métal que rien ne va tordre, parce qu’on a une haute idée de soi, à prendre ou à laisser. Mais ne pas considérer l’autre comme un lou ravi à qui tout expliquer en ar ti cu lant. Le passage du texte au BAT pose ces questions là. J’ai écrit Bien assise sans le vouloir, parce que c’était plus fort que moi, je l’ai malaxé entre moi et moi, c’est à mes yeux qu’il devait se construire, tenir debout. Maintenant, si le moi-seule est fini, qu’il faut que d’autres voient ses jambes, qu’est-ce je fais, qu’est-ce que je peux, qu’est-ce qui me semble juste. Sur ce j’écoute Georges Didi-Hubermann dans sa troisième conférence sur les anges de l’histoire, je recopie ici ce qu’il cite d’un discours de Max Weber, avec là aussi la présence à l’arrière-plan du bras levé de musk.
(à 1H15mn environ) "Max Weber dit qu’il est incapable de construire une position qui pourrait faire face aux ‘questions du jour’, dit-il, il dit : je peux rien vous dire sur ce qui est en train de se passer. Donc, tout le monde est là comme ça, désorienté, il avait dans un premier temps refusé l’offre, il ne se sentait pas capable de, bon, finalement, il y va, il parle et il va faire cette conférence et la conclusion est absolument magnifique. C’est-à-dire que dans sa conclusion il y a quand même un sursaut par rapport à l’espèce de désorientation qui est perceptible au début de sa conférence. On est devant le désastre. Le désastre arrive, et devant le désastre Max Weber dit : écoutez, chers étudiants, il y a trois façons de ne pas mal se comporter devant un désastre. Il y a trois façons qu’il ne faut pas emprunter s’il vous plaît. La première façon c’est l’amertume, ne soyez pas amers. La seconde, ça serait d’accepter la situation, n’acceptez pas. Et la troisième, ça serait ce qu’il appelle ’la fuite mystique hors du monde’, ne fuyez pas hors de ce monde."
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Messages
1. block note - bras, 22 janvier, 19:00, par brigitte celerier
lu avec humilité aorès avoir mis trois longues plongées dans mes petits problèmes pour un texte sans intérêt pour lecteur éventuel (avec hésitation pour les guillemets aussi, sourire, mais c’était simplement parce que d’instinct je passais du style direct à l’indirect dans des échanges) pour l’atelier... oui le bras (mais viens de répondre, juste après avoir mis point final avant relecture parce qu’en outre il me faut lire et relire et parfois deviner parce que mes mains et pages traduisent très bizarrement ce qui s’écrit dans mon crâne... de répondre donc au commentaire que tu as gentiment posé sur Paumée, qu’avec ou sans bras levé — et avec moins de moyens financiers, sont à la rigueur gens à acheter et non comme Musk acheteurs) ces idées sont considérée comme normales depuis longtemps, simplement maintenant elles s’avouent davantage