block note - corne
jeudi 7 août 2025, par

Les capucines poussent dans rien, c’est-à-dire qu’elles sont des survivantes de l’année dernière et qu’elles émergent d’un pot ou entre les cailloux qui masquent le bitume, il y a eu des hasards extraordinaires pour qu’une graine éclate, passe l’hiver à sommeiller, et profite du contact avec un gramme de terre pas plus grand qu’un scarabée pour se dresser maintenant. Une grimpante court sur le sol le long du mur et je ne sais pas ce que c’est, peut-être l’ipomée, peut-être la suzanne, en tout cas c’est en la suivant (je la découvre ce matin qui s’entortille) que je trouve une plume pour la collection participative. La fleur de l’hibiscus est démoniaque et assez vigoureuse pour me dire que j’ai la chance d’être ici et maintenant et pas dans un incendie, sur une île avalée par l’eau, ou dans un territoire réduit en cendres et en gravats. Des policiers armés font leur travail, repousser, réprimer, enfermer. J’ai du mal à dire nous. Il y a trois heures, une dépêche de l’afp a titré "Juillet 2025 sur le podium des mois de juillet les plus chauds sur la planète". Je ne dis pas que tout va mal, que nous sommes irrécupérables, mais que le mot "podium", si mal choisi, est un signe parmi tant que même les personnes inoffensives abîment ou bien laminent, ou bien, même sans penser à mal, font du mal. Hier un journaliste parlait du "bal ininterrompu des canadairs" (c’est joli, bal, musique) sans penser à ajouter certains détails techniques (leur nombre, leur non-renouvellement, le budget qui leur est alloué). C’est aussi ça qui fait de la peine, la colère en cul-de-sac, sans raisons exprimées. Les faits sont accumulés sans leur cause, aussi on ne peut en vouloir à personne si on est fatigué, qu’on a autre chose à faire, qu’on est tiraillé par des événements personnels, on continue de marcher sur la structure sans la voir. Un bœuf a tué un grand chasseur. C’est l’attrait du "podium" qui provoque le tout racorni de la pensée-podium. Dès qu’on commence à tuer pour lui, on s’expose à devenir symbolique, ou métaphorique (tant de cadavres autour de soi, pour tuer la mort peut-être, ou se sentir vivant ?).

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Messages
1. block note - corne, 8 août, 07:34, par brigitte celerier
toujours émerveillée par cette vitalité !
1. block note - corne, 8 août, 08:31, par c jeanney
pour le dire vite, la vie c’est mieux que la mort :-) (lapalissade sympathique, mais réelle) (merci Brigitte !)