block note - de MW
jeudi 18 décembre 2025, par
Je me suis envoyé des mails cette nuit, pour ne pas oublier, mais je n’ai pas besoin de les lire ce matin, je n’ai pas oublié (c’est ce qui est ironique, combien de fois pendant la nuit, un réveil diffus et l’idée, la bonne idée, l’idée si juste, excellente, cohérente, c’est tellement évident, pas besoin de la noter, du sommeil par-dessus et le lendemain plus rien, l’idée a, pof, disparu). Maintenant, je les note la nuit, elles sont coincées, et je n’ai même pas besoin d’ouvrir le mail, écrire l’idée la nuit a suffi pour l’épingler. Un livre mien (encore que "mien", ça se discute) va paraître début 2026, MW, et j’ai été très occupée par sa mise en page ces derniers jours (et par des idées épinglées la nuit). J’avais l’impression de ne plus pouvoir y ajouter une phrase, mais au moment de trouver une façon de le présenter, c’est comme tout, définir quelque chose lui donne plus d’existence, plus de trame, j’aurais besoin de quelques idées pour l’étoffer, pour qu’il corresponde mieux à la définition que j’en fais. C’est toujours singulier la façon dont on voit les choses. Par exemple, je montre à H le cyanotype d’une méduse antifasciste, avec ses tentacules qui se transforment en trois flèches (symbole de triple opposition au nazisme, au stalinisme et au conservatisme réactionnaire). Mais H ne voit pas ce que je vois. La pâleur du blanc, la forme de crâne de la tête de la méduse, lui renvoient une image de mort, une image fasciste au lieu d’antifasciste. C’est comme ce film de Cronenberg que j’ai regardé hier, eXistenZ, que les critiques interprètent sous un angle philosophique complexe avec des références pointues, alors que je n’y vois qu’un nanard d’idées reçues (le virtuel dans le virtuel sous une couche de virtuel imbriqué dans le virtuel façon poupées gigogne et oh mon dieu, nous perdons de vue le réel "réveillez-vous pauvres fous" à base d’effets spéciaux qui sentent la feuille de chou-fleur mâchouillée). eXistenZ me donne envie de revoir Matrix (que je trouve bien plus finaud, plus profond et plus inventif). C’est perturbant parce que Jean-Baptiste Thoret, que j’aime écouter, porte au plus haut le cinéma de Cronenberg. Le dernier film de Thoret, je ne l’ai pas vu, mais je l’ai tellement écouté en parler que des images se sont formées dans mon esprit. Une ville sous la ville, l’humanité dessus, l’humanité dessous, les gagnants, les perdants, le casino qui réunit le tout, symbolique. La part de jeu de roulette dans la vie est énorme, la part de méduses aussi, de quelques bords qu’elles soient. On sait si peu de choses, sans compter le reste, qu’on imagine. MW porte un peu de ça, de l’existence, sans X et sans Z majuscules, interprétée et réinterprétée. J’en suis toujours à me demander "qu’est-ce que je garde, et si je le peux, qu’est-ce que j’ajoute dans la marge".
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Messages
1. block note - de MW, 18 décembre, 18:33, par Brigitte Célérier
si vrai les idées évidentes de la nuit disparues au réveil
si vrai les idées ntées et qui reviennent sans qu’on les relise (mais ça ne tient pas sur longue durée)
en m’appuyant sur ces deux justesses je considère vraisemblable que le film de Cronenberg si déicieusement d’apparence sophistiquée (le raffinement paresseux de la pensée) ne vaut que dalle