block note - du semblant
dimanche 17 novembre 2024, par
J’ai un problème avec la fiction, je ne sais pas comment la prendre, où la situer, où placer le curseur, à quel point elle est infiltrée. Ridley Scott réalise la publicité de l’eau é que s’apelorio quézac, lui il sait s’emparer de la fiction pour enrober une usine d’eau en bouteilles avec le contes et légendes d’une vérité désirable. Et même quand j’achète des œufs, c’est mon imaginaire de poules heureuses élevées en plein air qui est appelé, et leur agglutinement par milliers près de trappes inutilisées factuellement prend les couleurs champêtres d’un vieux livre d’images. Je crois que nous mangeons, que nous buvons de la fiction, que nous lisons de la fiction, même quand ce n’est pas indiqué sur la notice, et pas parce qu’il aurait tromperie, enfin si, mais pas seulement, il y a tant de désir d’être emmené. Le désir du sauveur, de l’homme fort qui répare, de la fierté retrouvée, de l’ordre réinstauré, ou le désir d’être pris en compte, ou entendu, ou d’avoir simplement la paix mentale, sans avoir la fatigue et la sueur d’examiner des questions insupportables de complexité, de fouiller et triturer ces questions à froid, en tentant de se débarrasser au mieux de ses propres clichés et facilités, quel boulot. Et la fiction du bon face au méchant, ces dégâts qu’elle provoque. Les termes comme « guerre juste », ces deux mots-là ne devraient pas cohabiter, on pourrait mettre logique, obligatoire, inévitable, mais « juste », cette fiction injectée là-dedans est lisse, brillante comme le cockpit d’un avion de combat. Quelqu’un dit à la radio « je lis pour m’évader, pour être emmené ailleurs ». Moi je ne veux pas être emmenée ailleurs, je veux être emmenée ici.
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