TENTATIVES

« la vie ça éparpille des fois / ça chélidoine et copeaux / ça bleuit ça noisette » [Maryse Hache / porte mangée 32]

BLOCK NOTE

block note - objectif

lundi 31 mars 2025, par c jeanney

Je commence à rapatrier toutes mes minutes papillon sur mon site, il y a un gros décalage, la minute papillon n° 50 va paraître mercredi sur le site de L’aiR Nu alors que je n’en suis qu’à la 23e ce matin "chez moi". La mise à niveau passe par des actes répétitifs mais pas inintéressants, surtout pour les illustrations, je vois des familiarités, ou des immobilismes, des stagnations, ou bien des idées fixes à creuser. Il y a un an, pratiquement jour pour jour, je postais déjà "on en a marre non ?", je n’avais pas idée de la suite, pire, en pire, empire. Si internet collapse pour telle ou telle raison mes sons seront effacés, sur ce site ou un autre, je ne sais pas à quel point on mesure le fragile de nos pratiques. On devrait intégrer le fait que lorsque quelque chose existe au lieu de rien, c’est une chance, le travail du hasard. Ça n’empêche pas la volonté de faire, mais ça donne une mesure plus terre à terre à l’importance du en devenir. Les choix deviennent du pourquoi pas. La part de hasard qui entre dans la fabrication de mes minutes papillon est très grande, je pioche dans un grand sac de sons, comme on le ferait avec des runes, je les étale et je les examine et c’est après que j’en découvre le sens, que j’interprète ce que j’entends comme on devine l’avenir à partir d’ossements d’oiseaux. Je décide d’à peu près vingt pourcents de ce qui s’écoute. Par exemple, placer une sonnerie ici ou une explosion là, je le décide. Mais pour le reste, tout vient au petit bonheur, c’est vraiment la bonne expression, le "petit bonheur", c’est un bonheur petit d’avancer sans voir où ça mène en découvrant ensuite comment le hasard s’organise fermement, objectivement. Ça n’est pas très énergivore ni très autoritaire, ni pédant, puissant ou théorique. Ça ne presse pas sur un bouton pour que sorte un ticket. C’est un peu "hors la loi". Sauf avec cette histoire d’internet qui lâcherait, parce que c’est dépendant de fibres et de générateurs superbes et dégoûtants. La pureté n’existe pas. Je reprends le travail d’aiguille. Le luxe de pouvoir fabriquer pour rien est extraordinaire. Ça devrait être un bien premier, comme l’eau, comme l’air, la nourriture et un minimum de confort. Quand la fabrication pour rien prendra plus de temps dans une vie humaine que l’occupation productive, on aura sûrement avancé. Les tribus occupées à chasser et cueillir travaillaient trois ou quatre heures par jour, pas plus. Le reste de leur temps c’était quoi, des chansons, des danses, des jeux et des dessins peut-être. Je repense l’art autrement, bêtement, comme une enfant, en m’arrêtant à "l’art, c’est inutile". Je décide bêtement que s’il y a un marché, des cotes et des investissements, ce n’est pas de l’art, mais du placement de produit. Je vois passer une conférence sur l’art, ça m’intéresse, mais lvmh l’organise, je coupe. Je ne coupe pas par souci de pureté, mais par instinct, ce qui est peut-être l’autre nom du hasard, hasard choisi.

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(site sous licence Creative Commons BY-NC-SA)

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