block note - soupeser
lundi 17 novembre 2025, par
Déplacement de meubles, de matériel, je réorganise mon quotidien, j’ai maintenant une fenêtre face à mon bureau, et je viens d’installer un point graines supplémentaire derrière la vitre pour les oiseaux, eux aussi sont invités à modifier leurs habitudes. C’est une question sérieuse dit quelqu’un, c’est légitime dit quelqu’un d’autre, et une troisième voix demande des réponses sérieuses aux questions sérieuses. Une fois l’agencement de l’espace de travail trouvé, je dois aller vers le plus précis, plus petit, plus méticuleux, explorer chaque boite, tiroir, soupeser chaque morceau de tissu, chaque collage sur carton, chaque brouillon imprimé, avec la question de le jeter/garder et si-oui-quoi-en-faire. Il y a des statistiques sur le temps de sommeil dans une vie, le nombre de douches converties en jours, pareil pour les repas, et quelle proportion de temps passé à s’habiller, à cuisiner, à attendre, à lire, etc., je ne sais pas combien de jours/mois/années je passe à me poser des questions (sérieuses) en quête de réponses (sérieuses), par exemple je vois très clairement, si je regarde droit devant moi par la fenêtre nouvellement disponible, un œil de bœuf au troisième étage d’un bâtiment, œil de bœuf traversant, c’est-à-dire qu’on voit la couleur du ciel derrière lui, peut-être par un autre œil de bœuf construit en symétrie, et je n’ai aucune idée de ce que je vois, à quoi ressemble cette pièce, à quoi est-elle destinée, qui l’habite. Avant-hier, longeant la mer, il y avait une de ces maisons de vacances, et j’ai pensé celle-ci est très bien aménagée avec ses baies vitrées face à l’horizon allumé de coquillards la nuit, et la plate-forme du chantier pour construire des éoliennes en mer se parera de guirlandes qu’on verra depuis ce salon en décembre. Quand il fera clair, on pourra apercevoir les deux tours blanches du Havre qui scintillent. Dans cette maison très bien placée, très bien vitrée, j’ai vu d’un seul coup au premier étage une forme humaine, mal discernable, car la vitre était floue, sûrement les gouttes de pluie mélangées au sable qui avaient séché à la surface. Je ne sais pas qui j’ai vu. Cette forme avait l’air sombre. Pas sombre en tant que couleur, mais sombre en ressenti. Comme un fantôme déprimé, car inactif peut-être. Je crois qu’il m’a fixée avec méfiance, comme si j’interférerais avec ses pensées graves. C’est un sujet extrêmement complexe dit quelqu’un. Je prends la photo avec l’œil de bœuf pour me souvenir du souvenir.
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Messages
1. block note - soupeser, 17 novembre, 19:05, par brigitte celerier
il n’y a rien ni personne dans la pièce aux yeux (ou oeuils ?) de beuf traversant... les pensées sombres n’y ont pas leur place (mais la vue s’il y avait quelqu’un pour voir serait plus limitée
2. block note - soupeser, 17 novembre, 19:33, par PdB
il y a une histoire de ce genre dans le film titré Ari - différente bien sûr mais ces maisons abandonnées, sauf les quelques semaines d’été, au bord de l’eau, et peut-être encore deux ou trois autres, mais quand on compte (hein) on parvient avec difficulté à douze ou même 15 sur 52 - il y a quelque chose de sérieux là-dedans (un peu comme le nombre de résidences que possèdent (jte prends un exemple au hasard) les stones - les macrons - les gens aisés) (jte dis même pas bernararno - ça ne va pas compter)