block note - un
mercredi 1er janvier 2025, par
J’ai de la haine pour le premier janvier, et elle déborde sur le deux, le trois j’arrive à le rabattre en arrière comme une mèche de cheveux qui gêne. Je hais le premier janvier d’exister, par sa voracité cérémonielle, l’obligation de dire certains mots au moment juste, des mots comme des sacs de plastique pris dans les branches des arbres. À chaque feu d’artifice autour de la planète que je vois par accident, je reçois un coup d’épaule idiot, celui d’une brute qui me fait valser contre un mur. En une seconde une liste de tristesses m’attrape, qui passe par les deuils, d’abord un qui est mien mais qui fait signe aux autres, et les lumières des fusées éclatantes assomment les deuils et les ignorent en plus de faire fuir les insectes, les oiseaux, et de salir le sol vivant. Je hais aussi le premier janvier de ne pas exister, de ne pas être à la hauteur de la demande. Ce jour est le même, sa lumière est la même et sa noirceur est identique à sa veille et à son lendemain, il y a les mêmes couloirs d’hôpitaux et de chambres isolées, les mêmes intolérables inouïs que l’on tolère que tous les autres jours, mais, au moins, les autres savent rester à leur place de jour sans se la raconter, puisque le monde est rond, l’année pourrait commencer en juillet ou bien le premier jour du mois de la couleuvre aztèque, ou bien le premier jour du ruisseau du peuple dont Truganini fut la dernière. Si au moins il enlevait l’arsenic de l’eau. Ce serait le jour de l’eau pure et je le célébrerais. Et je m’en veux d’être touchée par ce jour qui n’existe pas, commun et semblable aux autres, et ce jour qui existe, futile et incongru. Hier soir, il y avait des pétards et des rires, et j’étais bien jalouse de ne pas rire comme eux pour rien, de ne pas être capable de rire des explosions. Et je m’en veux comme tous les ans d’être obligée de prétendre que ce jour qui n’existe pas existe, ou que ce jour qui existe n’existe pas, ou de ne pas savoir reléguer ce jour au rang des autres jours, pas plus, pas moins, obligée de l’envisager comme un parmi les autres et différent. Je m’en veux certainement de ne pas savoir retourner ma rancune en une possible création qui n’ajoute pas de fiel, et puis, parce que, et pourquoi pas, je tente.
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Messages
1. block note - un, 1er janvier, 22:10, par brigitte celerier
je me demande combien pensent cela sans oser le dire
1. block note - un, 2 janvier, 10:16, par c jeanney
(oui, peut-être que je ne l’ai jamais dit aussi frontalement) (et le poster ici, me fait me le dire à moi-même aussi, c’est pas simple, mais c’est sincère)
2. block note - un, 2 janvier, 08:46, par PdB
(tout cela est vrai et bel et bon mais cependant aussi) (il nous faudra toujours tenter, oui) il est doux de se rappeler à l’amour de celles et ceux qu’on aime - tous mes vœux quand même...!!! :°))
1. block note - un, 2 janvier, 10:17, par c jeanney
oh oui, on se souhaite le meilleur hein Piero, pas d’autre choix que de tenter d’aller vers le mieux))))))