TENTATIVES

« la vie ça éparpille des fois / ça chélidoine et copeaux / ça bleuit ça noisette » [Maryse Hache / porte mangée 32]

BLOCK NOTE

Huit /

jeudi 30 octobre 2025, par c jeanney

J’ai discuté avec A hier, à un moment il y a eu l’idée de se pencher vers ce qui était là au départ et qui contient la suite. Par exemple pour lui les lieux étaient là d’entrée, la tentative d’épuisement des lieux est apparue presque tout de suite, sans qu’il en ait réellement conscience, sans même avoir lu Perec, un peu comme des tiges sortent du compost, et c’est telle ou telle plante qui prend la main et se dirige vers la lumière. Je crois que j’ai été un peu envieuse, parce que A pouvait nommer ses propres tiges, alors que moi, mon terreau n’est pas très lisible. Mais peut-être que c’est une vue de l’esprit. Je peux peut-être voir plus clairement que A ce qui sort de central chez lui simplement parce que je ne suis pas A. C’est peut-être ce qu’on cherche chez les autres, nos nerfs et comment ils se nomment. Je crois que pour ma part, j’ai compris que mon centre tend vers le geste de rassembler, comme sur la plage on ramène les grains de sable en murailles autour de soi, et chaque grain possède sa brillance, sa noirceur, je les agglomère en unités compactes en espérant que ça tienne, ça ne tient pas, je recommence, par contre je ne sais pas comment ils s’appellent ni quel hasard les a fait se retrouver là, comme moi. Mes tiges sont des gestes, c’est pour ça qu’elles n’ont pas de noms. De temps en temps je trouve un grain plus précieux que les autres. J’espère toujours qu’il saura nommer l’éventail des tiges vivantes autour de lui pour que je trouve enfin les mots. Mes grains ne sont pas pratiques. Ils n’entrent pas dans une catégorie. Ils peuvent être une phrase sortie de son contexte, un front ridé, une voix indéfinissable, le cri du faucon pèlerin en chasse, un autocollant sur un poteau, une plume coincée dans une rainure, un morceau de couleur, une toile, un fil, un adieu sur la plage avec en fond une construction spectaculaire faite d’échafaudages qui montent jusqu’au ciel et un acteur qui dit quelque chose comme Je croyais tant avoir les idées claires / Je voulais faire une chose honnête sans mensonges d’aucune sorte / Il me semblait avoir quelque chose de simple, si simple à dire, qui pourrait servir à tout le monde, qui aiderait à ensevelir pour toujours la mort qu’on porte en nous /

"Mi sembrava di avere le idee così chiare. Volevo fare un film onesto, senza bugie di nessun genere. Mi pareva d’avere qualcosa di così semplice, così semplice da dire, un film che potesse essere utile un po’ a tutti, che aiutasse a seppellire per sempre tutto quello che di morto ci portiamo dentro."

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(site sous licence Creative Commons BY-NC-SA)

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