une arche [les lycopodes]
vendredi 7 novembre 2025, par
on m’a donné un nom :
Celle-qui-a-pu-revenir
on est celle que l’on devient
des réponses viennent à vous
presque sans poser de questions
même si on commence à savoir
deux ou trois choses,
fondamentalement,
on ne voit pas grand-chose
je n’ai pas du tout fait le tour
je parle sans parler
le devin agite une petite sonnaille
qui appelle les génies et les morts
les génies sont ivres
parfois tellement ivres qu’ils ne viennent pas
les morts boivent aussi
l’ivresse des morts est connue
ils aiment se baigner dans la bière
(quand la bière est imbuvable
on sait qu’un mort est venu se baigner)
j’ai très peur de la
chambre des esprits :
on doit s’asseoir sur des tabourets
à quatre pieds
et les morts veulent te parler
moi je ne cherche rien
j’ai appris à lancer des coquillages
en fait je ne sais quasiment rien
sauf que
quand on montre une image
on raconte
le peuple des déshérités est magnifique
les gens forts ont des failles
enfin
on a peur,
quoi
en principe,
ça ne tient pas du visible
les génies exigent des sacrifices
les statuettes sont recouvertes
d’une croûte de sang
et cette façon de capter
c’est une faculté que nous avons
enfant
c’est une faculté que nous retrouvons
très vieux
le sang abreuve les esprits
il empoisonne les flèches
je viens de loin
plus on est seule dans un univers autre
plus il se passe de choses
c’est calme sans être calme
j’aurais aimé être accoucheuse
c’est toujours pareil
on tombe en amour d’un lieu
et après
on élargit
on joue sur des sites archéologiques
l’insouciance m’a été d’un grand secours
dans une vie traditionnelle
on ne parle pas de tradition
j’ai vu se construire une arche pour la fin du monde
.
(site sous licence Creative Commons BY-NC-SA)

