TENTATIVES

« la vie ça éparpille des fois / ça chélidoine et copeaux / ça bleuit ça noisette » [Maryse Hache / porte mangée 32]

VIDÉOTEXTES (#littératube)

phares (#littératube)

mardi 8 août 2023, par c jeanney

le texte audio a utilisé la « Langue de la girafe » (cf éditions abrüpt) en récoltant et assemblant des phrases et des mots entendus, pris au vol
matériel : émissions radiophoniques qui rendent compte de la visite de phares, reportages sur l’usinage de phares de voiture, vidéos de bricolages, documentaires de vulgarisation scientifique autour du thème de la lumière
certaines images proviennent de ces sources, d’autres arrivent par associations d’idées
je n’ai donc rien écrit moi-même ni tourné aucune image de ce film


(texte)

j’espère que vous avez le pied marin
vous allez débarquer
et si vous me posiez des questions pendant le trajet ?
on a le temps
on est à mi-chemin
c’est calme
on ne sait pas pourquoi
la vitesse n’a aucun intérêt
les phares produisent une lumière blanche
froide
proche de la lumière du jour
c’est une caractéristique non négligeable pour la sécurité
il y a des collectifs
certains amassent plus de pouvoir
plus de puissance
un bras métallique installe un dispositif
les socles avancent
quand on se rapproche on observe ça de près
on dira qu’on est bien quand on sera sur le caillou
là c’est encore à peu près maniable
c’est par séquences
des mâchoires de métal placent trois fils dans une machine
un préhenseur s’avance et plie l’extrémité extérieure des fils
faut serrer le mur
y’a un passage là
je vais pas pouvoir lâcher
des fois faut reculer
tout simplement
les participants sont informés qu’il n’y a aucun confort
le but ici
c’est de fabriquer un puits de lumière
j’ai filmé
caméra éteinte
le but
c’est de ne jamais lâcher
les personnes déclarent sur l’honneur qu’elles disposent des capacités physiques et mentales
leur permettant de débarquer
entre temps un convoyeur approche de petites tiges de verre sur un brûleur
notre vision
comme celle de toutes les espèces de notre planète
s’est adaptée à des ondes
à une lumière particulière
plus de la moitié des couleurs nous échappe
quand on est sûr
on y va
ce sont des séquences
l’attention des participants est portée sur la peau qui peut subir des dommages
on ne voit pas parce que là ça s’enfonce
je ne sais pas si on est armés pour ça
ça sent l’humidité chaude
le pain est cuit trois fois
sinon il moisit
c’est pas un soleil sec ici
ça ruisselle le long des murs
plus on chauffe plus ça condense
ici on prend son temps
parce que sinon ça n’est pas raisonnable
on est seul
mais on nous surveille
au travail
la veille
le travail de veille
c’est veiller sur le feu
dans la maison-feu
on n’a pas accès au feu
quand on voit le phare blanc
c’est qu’on est dans des eaux peu dangereuses
il était permanent au début
la nuit on le voit
le jour on ne le voit pas
c’est tout simple
les préhenseurs abaissent les tubes sur les assemblages
c’est le moment de faire un essai
tout l’air emprisonné est aspiré par le haut
voici une vue en contre-plongée
l’ajustage est lâche
on pourrait se prendre pour un roi
il n’y a rien de plus facile
c’est ce qui se passe pour la majorité des gens qui viennent ici
cet agencement est crucial
une série de griffes ramasse ensuite les phares
c’est une rencontre exceptionnelle
tout ça a été effacé en somme
le vent était si fort qu’on n’aurait pas pu tenir
on a installé les lignes de vie pour accrocher les harnais
on ne sait pas d’où ça vient
ça peut tout balayer
faut toujours être au large
on est quand même mieux
certes le débarquement est difficile
mais quand on y est
on est tranquille
je confirme
c’est un lieu légendaire
emblématique
mythique
tout ce qu’on voudra
y’a un bâti
qui contient une histoire humaine forte
on peut pas balayer tout ça et dire au revoir c’est plié
où est-ce qu’on est ?
il paraît que la légende vous précède
c’est un lieu de naufrage
on en sait que quelques-uns
on n’a jamais su
y’a plusieurs carcasses autour
c’est un cimetière de tous les temps
pour une raison très simple
comme l’eau est un tapis roulant
à la renverse
elle repart
même en ne faisant rien
on peut passer à travers
tout ça paraît brouillon
je schématise
on aurait construit ici
pour honorer les âmes des morts
tout le monde aurait donné son temps pour construire ici
ils auraient entendu sur place
des cris
des voix
les cris on les a trouvés
y’a peut-être deux cents ou trois cents goélands
ils se chamaillent dans tous les sens
tout le monde s’envole
on entendait le bruit du goéland en colère
après y’avait des bruits souterrains
c’est une faille
une sorte de grotte allongée
les lames prennent le boyau
ça comprime l’air
comme le bruit du métro
c’est un grondement souterrain
voilà les voix
ce chantier personne n’en voulait
les ouvriers venaient ici à reculons
traditionnellement
c’est le lieu où séjournait l’ankou
le messager de la mort
qui se promenait dans la barque de la mort
et celui qui le voit
est sûr de mourir pendant la nuit
on dit ça
moi
on m’a raconté toujours ça
moi
je ne l’ai pas vu
je ne suis pas encore parti de l’autre côté
les feux sont allumés
vous les connaissez par cœur
c’est joli
c’est majestueux
de nuit
comme ça
ils sont là pour des choses sérieuses
ça fonctionne par séquences
il y a des imbrications incroyables
des impressions de couleurs
le problème de la lumière
c’est la chaleur
plus c’est chaud
plus c’est fragile
le réflecteur renvoie la lumière devant
la position standard
c’est zéro
faut savoir un peu ce qui se passe autour de soi
pour eux
on est un feu de loin
un feu de chenal

.

(site sous licence Creative Commons BY-NC-SA)

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